Salut les keukins, moi c'est Thaïs, on me connaît aussi sur le web sous le pseudo de Nessie St. J'ai présentement quinze ans (bientôt seize, le dix-huit décembre hein, z'avez pas intérêt à oublier ) et toutes mes dents. Je vis en France, à Paris plus précisément, et j'étudie au lycée en Terminale S Je pense me connecter un peu tout le temps et poster 2 à 3 RPs par semaine, j'ai pas un bon rendement huhuhu. J'ai connu HDM grâce à ses merveilleux admins (*en mode lèche*) parce qu'ils sont tous aussi fous, déjantés et génialissimes les uns que les autres. J'sais aps trop quoi dire, sinon que je vous aimes d'amour vré mais vous le savez déjà hein KISS KISS LOVE !

Un pas après l'autre, un pied devant l'autre. Une petite fille sort de la forêt sous les rayons éclatant du soleil. Elle n'a pas plus de six ans, mais déjà ses yeux sont emplis d'une inquiétude anxieuse habituellement réservée aux grandes personnes. Elle fronce les sourcils, ses yeux sont plissés pour se protéger des rayons agressifs et sa bouche pouponne est retroussée en une moue dubitative. Elle se dévoile au soleil pour la première fois, et ce qu'elle voit lui déplaît. Des villes vides, peuplées de hordes d'enfants, livrées à la chaleur et sans ombre. Les bâtiments sont nus, tout paraît vide à cette heure du jour. La fillette jette un regard implorant en arrière, vers le couvert des arbres qui lui promet protection, fraîcheur et ombre. Un dernier regard vers ses parents qui, cachés dans l'obscure forêt, tentent d'échapper aux attaques assassines des spectres. Mais ils sont partis. Elle ne les voit plus, ils ont disparu dans les profondeurs du bois. Une larme coule sur la joue de la fillette silencieuse, qui a arrêté sa marche à quelques mètres de la lisière de la forêt. Elle ne les voit plus et elle ne les verra plus jamais. Lentement, sa petite tête se tourne vers la ville. Vers ces tours, ces clochers qui lui semblent si hostiles et qui réfléchissent vers elle les cruels rayons du soleil.
Elle se mord la lèvre dans un réflexe de regret. Une autre larme dévale sa joue pâle. Un reniflement ténu. Elle lève la tête, ses cheveux roux étincelant dans la lumière de l'été. Doucement, un pas après l'autre, d'une marche mesurée, cadencée, elle reprend son chemin vers la ville. Ses petits pieds hésitent sur le chemin poussiéreux. Elle trébuche sur une pierre. Mais elle continue sa route, résignée, bien décidée à se trouver un abri. Ils le lui ont dit, répété. Eux, ses parents. Ces deux êtres protecteurs qui viennent subitement de disparaître de sa vie à tout jamais. Ils lui ont entré deux choses dans la tête : de un, son nom. Elle s'appelle Ophelia Medianotte, et cela pour toujours. C'est bien la seule chose fixe dans une vie si incertaine, remplie de pièges, d'embûches et de surprises. De deux, la première chose à faire. Trouver une bande d'enfants, n'importe laquelle, s'y agripper, s'y accrocher, car c'est de sa survie qu'il est question. Elle n'a pas très bien compris pourquoi, mais l'heure n'est plus aux questions. A qui les poser ? A cette touffe d'herbe, là sur le côté ? Au ciel, aux nuages, au soleil ?A l'infini qui s'offre à elle bien trop tôt, de manière bien trop brutale ?
Les interrogations se bousculent dans sa petite tête tandis que la fillette avance, de plus en plus lentement, butant de plus en plus souvent sur les petits cailloux qui jonchent le chemin. Mais sans se soucier de la poussière qui recouvre ses chaussures, du soleil qui lui laboure la peau ou de la fatigue qui la ronge peu à peu, la petite Ophelia pénètre à l'intérieur de Cittagàzze. Les murs semblent s'écarter quand elle les frôle de trop près, les pavés disjoints ont l'air de se rassembler sous ses pieds. La ville l'accueille.
Soudain, se rapprochant, des cris, des exclamations. Des voix d'enfants. Chansons joyeuses, jurons déplacés, discussions animées. Une horde de gamins en culottes courtes passe le coin de la rue. De cinq à quinze ans, dirons-nous. Les plus grands rient aux éclats, les plus petits suivent docilement la marche du groupe. La fillette, ébahie, ne remue pas d'un pouce. Elle se contente de fixer la bande de gais lurons qui s'approche d'elle. Un des plus grands, un garçon de treize ou quatorze ans, lui lance un regard inquisiteur. Après un coup de coude dans les côtes de son ami suivi de quelques mots à son oreille, la bande entière, telle un seul homme, bifurque dans la direction de la rouquine. Arrivés à la hauteur de la petite, tremblante, qui n'ose pas dire un mot, ils s'arrêtent tous, formant un demi-cercle autour de son corps gracile. Celui qui semble être le chef de la bande, le plus charismatique, se penche vers elle jusqu'à positionner son visage à la même hauteur que la frimousse effrayée de la petite enfant. Après avoir promené son regard scrutateur sur toute la surface du visage de la fillette, il plonge ses prunelles brunes dans les yeux verts écarquillés de son vis-à-vis. Une poignée de secondes s'écoule avant qu'il n'adresse un bref signe de tête à l'un de ses sbires. Il se retourne vers la petite, la surplombant de toute sa taille – de tout ce qu'un enfant de onze ans peut avoir d'impressionnant – et la toisant de son regard impérieux. Bien sûr, il sait ce qu'elle vient faire ici. C'est ce qu'ils sont tous venus faire, livrés à eux-même beaucoup trop tôt, à l'orée de leur enfance. D'un air solennel, il s'éclaircit la gorge et prend la parole, de sa voix de flûte :
« Comment t'appelles-tu, nouvelle ? »
« Ophelia Medianotte, » répond-elle en un murmure presque inaudible.
« Eh bien Ophelia, joins-toi à nous. Prends une place au sein de la horde, là-bas par exemple, avec Mercuzio et Darlena. Oui, les petits là-bas. Quel âge as-tu ? »
« J'ai six ans et demi. »
L'affirmation est plus assurée. Le laissez-passer est obtenu, elle peut faire son entrée dans le monde. Grandir, vagabonder, et finir en fuite, traquée, échapper pour le restant de sa vie à des entités cauchemardesques et menaçantes dont elle a à plusieurs reprises entendu parler. Un hochement de tête du chef de la bande, et les voilà tous repartis. Le petit garçon à la droite d'Ophelia lui décoche un clin d'œil et s'adresse à elle :
« Alors, tu t'appelles Minuit ? »
« Non, » lui répond-elle d'un ton calme, apaisée d'avoir rempli son objectif. « Mon vrai nom c'est Ophelia. »
« Tant pis, » rétorque le garçon avec un haussement d'épaules, « j'ai décidé de t'appeler Minuit. Et tout le monde ne tardera pas à faire pareil. »
Son premier souvenir.

Un cauchemar. Une tête aux yeux écarquillés, auréolée de cheveux roux, surgit des draps. De grosses gouttes de sueurs perlent sur son front, sa respiration est tremblante. Ses yeux roulent dans leurs orbites, cherchant désespérément une échappatoire. Ses dents se plantent dans sa lèvre inférieure, faisant couler un peu de sang rouge et velouté dans sa bouche. Doucement, elle se redresse et bientôt un buste entier surgit des draps défaits et trempés de sueur. Assise dans son lit, la jeune fille jette à nouveau des regards affolés autour d'elle. Chaque nuit, elle les entend, elle les sent venir. Ils la convoitent, l'épient, la guettent. Ils attendent le moment où elle sera vulnérable pour s'emparer d'elle à jamais. Rien pour cette fois, une fausse alerte, la petite chambre est vide.
Se redressant un peu plus, la rouquine essuie d'une main fébrile son front humide. Ses doigts tremblent, et un effort de concentration est nécessaire pour les maîtriser. Pour contrôler son corps tout entier qui lance des appels à l'aide, déréglé par la frayeur qui a envahi son esprit. L'indécision : peur justifiée ou paranoïa ? Sa respiration se calme. Elle inspire et expire sur un rythme doux, habilement contrôlé. Son souffle traverse l'air moite de la pièce comme une perturbation atmosphérique.
Avec des gestes lents, elle repousse les draps entortillés autour de ses jambes et replie celles-ci afin de s'asseoir en tailleur. Elle appuie son menton sur ses mains, en proie à une réflexion intense. Un pli apparaît sur son front, exactement entre ses deux sourcils. Ses prunelles se fixent sur la fenêtre d'où filtre un fin rayon de lune à travers la chambre. Depuis sa position, tout ce qu'elle voit est un mur décrépi, ruiné par l'absence d'entretien. Son visage se crispe dans un dernier spasme nerveux, et sa elle passe machinalement sa langue sur sa lèvre inférieure, goûtant à la saveur rouillée du sang. Une dernière expiration, un puissant soupir. Sa décision est prise. Elle va faire ce qu'elle aurait dû faire depuis longtemps.
Rapidement, elle sort une jambe du lit en désordre, puis la seconde. On peut lire sa détermination dans ses pupilles fixes et ses sourcils froncés. Elle est debout sur ses deux pieds au milieu de la pièce, encore indécise sur la direction à prendre, sur la direction à donner à sa vie. Le parquet craque sous ses pieds nus. Elle frissonne à peine. Mais elle n'a pas froid. Elle est habitée par la fièvre de l'aventure, de l'inconnu. Elle se sent scintiller dans la faible lumière du milieu de la nuit. Sans prendre la peine de s'habiller plus qu'elle ne l'est déjà, de mettre des vêtements plus chauds que la petite chemise de nuit qui couvre son corps aux formes trop féminines ou même d'enfiler une paire de chaussures, elle part. Un pied devant l'autre, calmement, sans se précipiter. Elle dans un état second, incapable de penser à autre chose que son propre pas régulier, qui la mène vers des terres inconnues. Ses pieds la mènent dehors, dans la rue. Personne ne vue. Les enfants dorment, les adultes meurent. Les rues sont baignées de la douce lueur de la lune, et sous cette lumière, tout paraît moins vide, moins effrayant. La nuit habite les lieux. Cittagàzze est paisible, la nuit. Ici, une gargouille qui projetait son ombre inquiétant sous les rayons crus du Soleil n'est plus que risible, là, une tour qui se dressait, lugubre, parmi les maisons, n'est plus qu'un bâtiment aux pierres rondes et luisantes prêtes à accueillir les oiseaux nocturnes. Lentement, elle remonte les rues de Ci'gàzze. Rien ne presse et, le visage tourné vers les façades pâles, elle marche distraitement.
Ses pas la conduisent devant une horloge. Machinalement, elle consulte l'heure, et ce qu'elle voit la fait sourire. Il est minuit. C'est son heure à elle, celle qu'on lui a attribué. Minuit, l'heure d'Ophelia. C'est l'heure de partir, d'abandonner tout le monde, tous ceux qu'elle connaît, tous ceux sur lesquels elle compte. Partir pour eux, partir loin d'eux. Avec un serrement de gorge, la rouquine reprend sa marche silencieuse vers la sortie de la ville.
La route s'offre à elle. Un long chemin sinueux pavés de pierres irrégulières, polies par les pas de ses prédécesseurs, serpente à travers la campagne. Une lande à perte de vue, et, elle le sait, une forêt. Au bout de la route, là où celle-ci n'est plus qu'un chemin de terre jonché de cailloux. La forêt, là d'où elle vient et là où elle est destinée à retourner. Après une brève pause afin d'observer la campagne, Ophelia reprend sa route, irréductible. Elle ressemble à une somnambule, marchant le regard dans le vague, telle une rêveuse, uniquement vêtue d'une chemise de nuit et caressant de ses pieds nus les douces pierres. Les pierres sont douces. L'air est doux. La nuit est douce.
Cependant, alors qu'elle tente de deviner quand sera la prochaine pleine lune, son regard rencontre quelque chose d'étrange. Elle n'en a jamais vu avant, ce n'est pas un arbuste qui a poussé de manière singulière sur le bord de la route ni une pierre qui brille anormalement sous les rayons de lune. Cela ressemble à une fenêtre, lévitant au-dessus du sol. La rouquine approche sa tête de l'ouverture, tentant de voir à travers cette étrange perturbation. Tout est sombre, néanmoins quelques formes mouvantes sont visibles. S'approchant un peu plus encore de l'image, la jeune fille passe par mégarde la ligne invisible, la frontière à ne pas franchir. En un clin d'œil, elle disparaît du chemin pavé, de la campagne estivale et du monde des enfants.
Elle va rejoindre le monde des adultes.

Ucey